Depuis un temps immémorial, l’Eglise qu’elle soit orientale ou latine prévoit dans ses liturgies le sacramental du «pain béni »
A l’occasion du Synode sur la
famille qui se déroule cette année, la question concernant les personnes
divorcées puis remariées a pris une place importante. Il est vrai que le terme « famille »
ne désigne pas uniquement la situation difficile qui semble prendre le pas.
Pourtant ce thème est-il à aborder sereinement au sein de l’Eglise.
Beaucoup de propositions ont été
faites dans les diocèses lors d’assises extraordinaires, ou bien dans le
travail fait par nos évêques en vue de la tenue de la séance conclusive du
synode.
Ces propositions étaient
difficilement applicables, sans toucher à l’indissolubilité du mariage. Il va
de soi désormais qu’on ne peut toucher à ce principe sans toucher en même temps
à la sacramentalité de l’Eucharistie et donc à la sacramentalité de l’Eglise.
Nous avons donc affaire à un tricot. Tirez sur le fil
d’un lainage et le vêtement entier est défait.
Brièvement, l’Eglise nous rappelle que la communion
eucharistique doit se recevoir nécessairement en cohérence avec le sacrement de
mariage ou en cohérence avec la chasteté à laquelle sont appelés les chrétiens
célibataires. Ainsi, la question n’est pas de savoir comment les personnes
divorcées-remariées pourraient communier, mais plutôt dans quelles
circonstances les chrétiens (célibataires, mariés, quelle que soit la
situation) doivent communier ou s’abstenir de ce sacrement.
Attention, s’abstenir de communier n’est pas à
confondre avec le fait d’être excommunié. Non, les personnes divorcées
remariées ne sont pas excommuniées. Cependant, il serait dangereux de parler de
l’Eucharistie comme d’un droit ou comme d’un devoir. C’est un don, point.
La communion eucharistique nous sanctifie, nous
rachète, et fait de nous le corps du Christ…
Le pain béni, encore en usage dans l’Eglise Catholique
d’Orient et dans l’Eglise Orthodoxe, n’est pas de la même nature. Pour le coup,
ce pain là, c’est juste du pain, substantiellement du pain !
Mais qu’est-ce que ce pain béni ? C’est du pain
levé, celui que nous mangeons lors du repas, un pain ordinaire qui était
distribué aux fidèles à la fin de la messe et parfois apporté aux familles comme
gage d’amour
mutuel et de union, pour inciter les
chrétiens à pratiquer surtout les vertus de charité,
et l'unité dans l'esprit. La question se pose de savoir si,
malgré le risque de confusion, il serait opportun de le rétablir pour permettre
aux personnes divorcées et remariées de 'participer', sans pour autant
communier sacramentellement. Elles s'approcheraient ainsi d'une communion qui
se définirait davantage comme un acte d'attachement ecclésial que comme un acte
de communion d'ordre sacramentel. De fait ils sont membres du peuple de Dieu et
ne sont pas excommuniés.
Ce pain, image d’un désir d’unité, renforce, -pas
aussi parfaitement que l’Eucharistie bien sûr- l'attachement de tous les fidèles
à l'Eglise. Il rappel aussi la conversion nécessaire à la vie Chrétienne
ordonnée à la communion plénière et parfaite contenue dans l’Eucharistie. En
outre, il me semble qu'il n'y ai pas de lien direct ou indirect avec l'indissolubilité
du mariage, et que, par conséquent, tous les baptisés peuvent le recevoir.
De plus ce sacramental ne vise pas spécifiquement les
divorcés-remariés, mais aussi ceux qui ne se sentent pas prêts à communier,
ainsi que les autres qui ne pourraient pas effectivement recevoir le Sacrement
de l'Eucharistie.
Aujourd’hui, comme hier, le dogme de la
transsubstantiation est souvent mal compris ; la présence réelle du Christ
est difficilement intégrée. En effet, elle est tantôt définie comme un symbole,
une analogie, une métaphore, etc. Le pain béni, donc permettrait de redire la
spécificité de l’Eucharistie par rapport au pain levé de tous les jours.
Le pain
béni, un sacramental.
La finalité
des sacrements est l’union avec Dieu, ou autrement dit le fait de pouvoir vivre
à la suite du Christ le mystère Pascal. Les sacramentaux, eux, sont des aides
pour vivre cette réalité nouvelle au quotidien. Les sacramentaux agissent ex
opere operantis Ecclesiae, c'est-à-dire du fait de l’action de
l’Église, et non pas du seul fait que le sacrement est accompli comme c’est
le cas de l’Eucharistie.
En somme, comme
c’est souvent le cas, cette proposition comporte à court et moyen terme un risque
de confusion. Ce risque me parait surmontable du fait que le pain ne soit pas
le même que celui de l'offrande, qu'il est distribué à la sortie de la messe.
Il est offert par les familles. Selon l'antique coutume, il est béni avant
l'épître; ainsi l'acte pénitentiel se finissant, la gloire de Dieu étant
chanté, la bénédiction du pain béni arrive juste à propos. L’exigence
missionnaire est donc celle-ci : il faut parler de nouveau de l’Eucharistie,
de sa source, de la présence réelle et de ses effets. Le risque de confusion
sera donc maitrisé par la distinction qui sera faite entre le Pain béni et
celui des saints mystères, l’Eucharistie.
Kevin Emmanuel L.
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